Où serait le plaisir ?

Le soleil brille. Quelques petits nuages inoffensifs moutonnent dans le ciel, bref, un temps idéal pour une expédition photographique. Trédrez n’est pas loin , son enclos paroissial est un sujet de choix, que je dois encore capturer, extérieur et intérieur de l’église. Vers trois heures la lumière sera bonne, mettons nous donc en route à deux heures, le temps de se mettre en place.

Tout vérifier avant de partir : la chambre et tous ses accessoires (dos, objectifs, cellule, avec la valise on n’est pas loin des quinze kilos), les plaques chargées (il vaut mieux y avoir pensé la veille), le pied. Pour l’intérieur, en N&B, pas de problème avec la chambre ; en couleur, là, il faut la valise Blad et le flash de terrain, encore vingt kilos avec les bricoles indispensables. On met tout ça dans le coffre et c’est parti.

C’est sur place qu’on rentre dans le dur, et d’abord garer la voiture : pas trop loin parce qu’il va falloir se coltiner le matos à pied d’œuvre, et pas trop près pour ne pas être dans le champ…de prise de vue, bien entendu.

D’abord l’extérieur. On sort le pied, le cadre de visée, et on commence à se promener dans l’enclos, jusqu’à avoir trouvé où poser le pied pour couvrir le clocher et la façade. La réponse est : dans le coin sud-ouest. Oui, mais il faut utiliser le 65 mm…ce qui veut dire : retourner à la voiture, ouvrir la caisse « chambre », sortir celle-ci, démonter le soufflet, le remplacer par le manchon spécial, visser le 65mm dans le bon sens, le placer sur la chambre, et retourner au pied du trépied (Ne pas oublier d’emporter la cellule, la loupe de visée et une ou deux plaques c’est selon , sinon c’est encore un A/R). Un fois en position, placer la chambre à la bonne hauteur, et commencer cadrage et mise au point. Avec les décentrements, compter pas loin d’un quart d’heure avant de trouver le point, régler le diaphragme (là , c’est pas dur, on ferme au max, pour la profondeur de champ et le cercle d’image), et prendre le temps de pose à la cellule. Comme on veut du soleil, il faut parfois attendre que ce petit nuage de rien du tout qui, il y a encore,cinq minutes était à l’autre bout du ciel , ait libéré son ombre (vous avez remarqué comment il insiste dès qu’on n’a pas besoin de lui…). Voilà, on ferme l’obturateur, on met la plaque, on enlève le cache, on arme et clic. C’est fait. On remet le cache, on retourne la plaque par sécurité, on refait le manège et reclic.

Fin de la première étape. Si on choisit de prendre un autre angle, rebelote. Avec un peu d’entraînement, la deuxième prise se fait en quinze minutes au lieu de trente. On passe alors à l’intérieur, aux salamalecs avec le stagiaire d’été qui garde l’église et commente la visite, et s’effraye de voir débarquer tout cet attirail.

Je vous raconterai plus tard, parce qu’il commence à se faire tard et que ledit stagiaire, lui il ferme à cinq heures. Si vous lui dites que vous en avez encore pour une heure ou deux alors qu’il est pas loin de cinq heures, il vous propose gentiment de revenir le lendemain pour la suite, ce qu’il faut bien se résoudre à accepter. Alors on remballe tout, on remet dans le coffre caisses et pieds (deux ou trois voyages quand on n’a pas d’assistant), et on prend rendez-vous pour le lendemain afin de « faire » l’intérieur. Là, avec les réglages de lumière, l’équilibrage du flash et du soleil dans les vitraux, montage et démontage des boîtiers, objectifs, magasins et films, compter deux bonnes heures, entre les visites et les visiteurs, leurs questions, et les quelques clics.

Surtout, ne jamais courir, c’est le meilleur moyen de sauter une étape, et comme il est indispensable de toutes les faire et dans l’ordre…

En deux jours, vous avez pris à tout casser douze clichés. Il n’y a plus qu’à les développer (autre source de transpiration), pour admirer le résultat, et réserver le scanner avant de photoshopiser tout ce bazar : encore deux jours de boulot, mais le résultat en vaut la chandelle (au moins pour vous…).

Dire qu’il y a des gens qui passent dix minutes à la visite, avec leur petit numérique (ou leur gros), et s’en repartent contents d’avoir de quoi alimenter leurs souvenirs. Sont-ils sûrs d’avoir bien regardé ?

J’aurais pu en faire autant…Où serait le plaisir ?

Joël Vandenberghe, avril 2008


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