Quand on veut donner de la vigueur à une image un peu sombre ou un peu terne, il est naturel de retoucher sa luminosité ou son contraste, mais on peut aboutir à une montée excessive des couleurs lorsqu'on ne prend pas de précaution et que la retouche est un peu forte. Le but de cet article est de présenter le problème autour d’un cas concret et de proposer plusieurs remèdes.
Donc, voilà l’histoire. J’étais parti à la rencontre de curiosités géologiques et j’ai rapporté l’image suivante (euh... si vous voulez tout savoir, il me semble qu’il s’agit de couches de dessiccation dans de l’argilite, mais je ne garantis rien) :
J’avais été attiré par la variété
des couleurs, mais l’image obtenue était plutôt
grisouille ; l’histogramme avec sa bosse plutôt étroite
centrée au milieu confirme cette impression. Pas vendable
!
On peut d’abord se demander s’il n’était pas possible à
la prise de vue même d’obtenir une image plus agréable
à l’oeil. La photo a été prise par un jour
ensoleillé, mais à l’ombre. L’appareil a fait
honnêtement son boulot en ramenant au gris moyen le champ
grossièrement homogène qu’on lui demandait
d’embrasser ; simplement, il n’y avait pas de zone notoirement
plus claire ou plus sombre que cette luminosité moyenne et il en est
résulté cet histogramme trop étroit. On peut penser
que les ombres dans l’image ont été éclaircies
par la lumière diffuse du ciel et qu’elles auraient
été beaucoup plus profondes si on avait pris la scène
sous un soleil direct ; l’histogramme aurait été
fortement élargi vers les noirs, et du coup, son recentrage par
l’appareil aurait créé les tons clairs qui manquent
à cette image. Mais bon, il n’y avait pas de soleil ce jour
là et puis, n’est-ce pas, quand on a une grande confiance dans
les traitements numériques, on prend la photo quand même et on
se dit que ce bon vieux Photoshop fera le reste après coup...
Le premier réflexe est d’égaliser les niveaux comme
indiqué dans la figure suivante. Comme attendu, l’image
s’éclaircit, mais aussi, ses couleurs deviennent beaucoup plus
vives :
On peut aller plus loin et obtenir des couleurs encore plus vives en
augmentant un peu le contraste dans les tons moyens comme indiqué
ci-après :
Comment doit-on réagir devant cette montée des couleurs ?
On peut tout d’abord ne pas se poser de question, parce qu’on cherche simplement à fabriquer des images les plus attrayantes possibles. On part d’une photographie pour cela, mais on ne soucie pas de réalisme dans le traitement numérique qu’on lui fait subir et il est clair qu’on peut aller infiniment plus loin.
D’autres photographes cependant gardent en tête que la photographie est censée être un reflet de la réalité – surtout des photos à caractère documentaire – et ils se demandent s’ils doivent accepter ces couleurs. Il ne faut pas croire naïvement que ces couleurs étaient déjà cachées dans le document original et qu’elles n’attendaient qu’un bon traitement pour sortir au grand jour ; ne pas croire non plus, sous le prétexte qu’on n’a pas touché au réglage teinte/saturation, qu’on n’a pas triché. La vérité est que l’augmentation du contraste d’une image en mode RVB augmente à peu près automatiquement la saturation des couleurs.
Il n’est pas trop difficile d’en comprendre la raison en invoquant un modèle TSL (Teinte/Saturation/Luminosité) pour les couleurs. Il est entendu que ces modèles ne décrivent pas correctement la perception des couleurs, mais on peut tout de même leur accorder un intérêt qualitatif. Dans le plus satisfaisant des deux modèles différents utilisés dans Photoshop, la saturation des couleurs est tout simplement proportionnelle à la différence (max-min) de la plus grande et de la plus petite des 3 composantes RVB et elle est tout bonnement multipliée par la pente de la courbe de correction. En conséquence, elle augmente quand on augmente le contraste, CQFD.
Si on veut éviter cette montée de la saturation, en toute
rigueur, il faudrait passer en mode LAB avant d’appliquer la
correction du contraste. En pratique, on pourra se contenter d’une
méthode approximative, en restant en mode RVB et en appliquant la
correction en mode luminosité (soit en utilisant un calque de
réglage avec le mode de fusion « luminosité », soit
en faisant une correction directe et et en choisissant ce mode
tout de suite après dans le menu
Edition > Atténuer). Les figures suivantes montrent
qu’on obtient ainsi des
couleurs très voisines :